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Chroniques
Giovanna d'Arco | Jeanne d’Arc
opéra de Giuseppe Verdi
Événement toujours emblématique et médiatique, l'ouverture de la saison scaligère met à l'honneur un Verdi relativement rare, cette année [lire notre critique du DVD et notre chronique du 19 novembre 2004]. Créé à la Scala de Milan en 1845, Giovanna d'Arco a quitté la scène lombarde vingt ans plus tard et constitue une étape éloquente dans l'évolution du compositeur italien, où la manière deNabucco cohabite avec des fulgurances sombres qui annoncent Macbeth – l'ouverture, à cet égard, se révèle admirable – ou un héroïsme que développera Il trovatore.
Dans un dispositif dessiné par Christian Fenouillat, la production de Patrice Caurier et Moshe Leiser, duo excessivement sollicité par le monde lyrique, s'appuie sur les créations vidéographiques d’Étienne Guiol pour reconstituer la révélation de la Pucelle d'Orléans à la manière d'un retable où le peuple choral occupe la prédelle. Prometteuse, l'intention ne va guère plus loin, le reste de la soirée se contentant d'illustrations banales où l'intérieur bourgeois le dispute à des monstres infernaux qui font sombrer le délire de l'héroïne dans une démonologie plus proche du Guignol que de Bosch. On pourra toujours apprécier l'étincelante dorure des armures royales dessinées par Christophe Forey.
Inutile de le cacher davantage, pour ce retour de l'opus verdien sur les planches de sa création : les trompettes de la renommée sonnaient d'abord pour l'incarnation d'Anna Netrebko dans le rôle-titre. Et en effet, les moyens du soprano russe ne manquent pas d'impressionner – médium opulent, graves nourris, sans que l'assombrissement, sinon l'épaississement sensible du matériau, n'obère les aigus. On pourrait désirer un soupçon supplémentaire de subtilité, voire de fragilité, au delà d'un savoir-faire incontestable, mais l'applaudimètre n'en a cure.
En Carlo VII, Francesco Meli affirme une souveraine vaillance et réussirait presque à damer les étoiles à sa partenaire par son lyrisme aussi vibrant que stylé. Souffrant les premières représentations, Carlos Álvarez ne néglige aucunement l'autorité paternelle sous laquelle finit par poindre une tendresse des sentiments, même si le timbre semble souvent terni en comparaison du souvenir qu'il avait laissé au fil de sa carrière. Au sein d'un ouvrage dont la distribution vocale se résume presque au trio brocardé par George Bernard Shaw, Dmitri Beloselskiy concentre la vigueur de Talbot, quand Michele Mauro ne démérite point en Delil.
Pour l'inauguration de son mandat de directeur musical à la tête de l'Orchestra del Teatro alla Scala, Riccardo Chailly fait montre d'un métier accompli qui aurait gagné à être mieux soutenu par la dialectique dramaturgique : homogénéité et dynamisme des pupitres imposeraient alors leur vérité.
GC